Pour m'éviter les répétitions dans mes mails, voici les liens qui répondent à l'éternelle question du "COMMENT ON FAIT SAGEUUUH-FEMMEUUUH?"

samedi 30 juin 2018

Une bonne grosse moitié de faite

Depuis que je suis rentrée à l'école de sages-femmes, fin juin est la période du bilan sur mes études, parce que
- d'une part, c'est l'heure d'actualiser frénétiquement l'ENT avec l'arrêt cardiaque de quand je vois que les résultats sont affichés et que j'en louche sur la page tellement je panique à l'idée de devoir passer aux rattrapages
- d'autre part, c'est le gala des nouvelles diplômées (et plus je grandis dans l'école, plus les nouvelles diplômées sont des élèves que j'ai vu évoluer, des élèves que je considérais comme des "grandes", et que quand je me retrouve à leur place je m'aperçois que j'en mène vraiment pas large !) (Si j'avais eu ma PACES primante, à l'heure où j'écris ces lignes, j'aurais été diplômée) (Et je m'imagine absolument pas diplômée tout de suite maintenant)

C'est le bilan des 2 ans.

Il y a 2 ans, en 2016, j'étais à la fin de ma Ma2, et accessoirement enceinte jusqu'aux dents. J'étais finalement allée jusqu'au neuvième mois de grossesse en concluant le tout par des partiels (et un rattrapage, pour 0.5 points, parce que le jury semblait avoir oublié que j'allais devoir passer le rattrapage avec un être humain de 3 semaines à gérer sur fond de périnée digne d'un paysage de bagdad).

La pression sociétale et scolaire, et les hormones de fin de grossesse qui m'ont enlevé tout stress comme si j'avais fumé 14 pétards m'avaient laissé me dire que "Quand même, je vais peut être essayer de faire ma Ma3 en un an, je rattraperai mon stage que je peux pas faire cet été pendant les vacances, j'aurai pas de vacances tant pis".
C'était la douche froide quand l'école m'a dit à l'aube de la rentrée en Ma3 que je n'aurai pas le choix que de la faire en 2 ans. Je me sentais nulle de "redoubler" même si ce n'était pas vraiment le cas, j'avais l'impression de faillir dans le rôle d'étudiante wondermaman intouchable, l'impression de donner raison à ceux qui avaient pu dire "Autant qu'elle arrête ses études tout de suite".

J'avais juste pas capté que quand t'étais une jeune maman allaitante, t'étais claquée. Que t'étais encore plus claquée quand tu recevais des visites tous les jours, et que ton bébé était réveillé toutes les nuits. Que reprendre l'école en emmenant son bébé c'était un parcours du combattant dans le tram. Que mon chéri allait être vraiment très beaucoup pris par les ECN. Que ma fille allait faire un mois de réanimation et qu'on ne dormirait pas avant le printemps d'après. 
Et que bordel, j'avais de comptes à rendre à personne, j'étais sa maman, je perdais un an scolairement non pas par des manques de résultats scolaires mais pour gagner deux ans avec elle. Un mi-temps desperate housewife - élève sage femme dans sa blouse trop grande et sa queue de cheval douteuse de fin de garde.

J'en arrive à cette fin de mi temps. J'ai validé tous mes partiels comme une grande fifille que je suis, même si ma petite fifillle avait la bonne idée de me faire un combo chiassou-gerboulade chaque semaine de révisions.
Je suis allée en stage, et j'ai eu deux ans pour progresser dans mes gestes cliniques tout en mûrissant au fur et à mesure, et ça je l'ai ressenti dans mes relations avec les sages-femmes et les patientes. J'ai senti l'adrénaline des salles de naissances quand la tête du bébé pousse fort sur mes mains, j'ai appris à une maman malentendante les bases de l'allaitement en écrivant tout et mimant pendant les suites de couches, j'ai découvert la charge mentale des sages-femmes libérale et fait des sketchs de préparation à la naissance, j'ai vu défiler des patientes et autant de foetus précieux à surveiller en 20min chrono pendant des journées entières en consultation, j'ai montré le visage de leur petite soeur à deux grandes filles sous le regard de leurs parents en échographie... et tous les soirs j'enchaînais sur mon rôle de maman.

J'ai pris 2 ans au ralenti pour grandir en tant que sage-femme, mais j'ai grandi en tant que femme plus que ce que j'aurai pu apprendre si j'avais fait ces stages sans avoir mon ressenti de mère, et j'ai appris à apprécier le temps passé en tant que maman, le temps passé en tant qu'étudiante, car quand je bois mon verre à 1h du matin, je sais que je dois en profiter, car une demoiselle n'oubliera pas de me réveiller à 7h le lendemain matin !

D'ici 2 mois, je reprendrai en 4ème année.

Dans 2 ans, si tout se passe bien, je serai diplômée. Et ce bilan du mois de juin sera le plus beau de tous, je pourrai raconter à ma fille qui aura 4 ans tout ce par quoi on est passées !